Si John le Carré est salué par tant d’écrivains comme l’un de leurs pairs, c’est bien parce qu’il ne se laisse pas enfermer dans un cadre univoque. L’entre-deux psychologique et métaphorique l’intéresse plus que le manichéisme idéologique, il aime ainsi explorer les zones d’ombre et la grisaille. Sa production littéraire elle-même est bien plus protéiforme que ne pourrait le laisser croire sa réputation. Il ne se réduit pas à l’étiquette « romancier de la guerre froide » et la fin de celle-ci n’a pas sonné le glas de l’écrivain ; bien au contraire, elle lui a permis d’étendre son terrain de jeu thématique et géographique pour mieux se recentrer sur l’humain. Auteur de 24 romans, John le Carré a aussi publié une pièce de théâtre, et des mémoires ainsi que de nombreux textes courts : contes, nouvelles, articles, tribune, billets discours et textes autofictionnels.
Le Cahier de L’Herne qui lui est consacré, paru au printemps 2018, s’efforce de percer les mystères de cet homme complexe et discret. On y retrouve un écrivain engagé, critique virulent de la guerre en Irak, « une de ces voix qui comptent dans la société civile britannique, une conscience morale dont les valeurs humanistes parlent aux citoyens du monde entier », selon sa traductrice Isabelle Perrin. Cette dernière, universitaire, traductrice depuis 30 ans (aux côtés de sa mère Mimi Perrin) des textes de John le Carré, revient sur l’élaboration de ce premier ouvrage en français consacré au maître du roman d’espionnage, dont elle est l’éditrice scientifique. La BILIPO accueille à ses côtés, deux contributeurs de l’ouvrage : Bernard Minier, auteur de 5 romans dont Une putain d’histoire (XO éditions, 2015, prix Polar de Cognac) et Nuit (XO éditions, 2017) ainsi que Michael O’Neil, universitaire, enseignant à l’université Sorbonne nouvelle Paris 3.